
Eto’o, Zambo, Clinton : Le festin de la honte !
Il y a des images qui choquent. D’autres qui blessent. Et puis, il y a celles-là. Deux photos, deux instants volés à l’intimité d’un déjeuner, mais qui en disent long sur le naufrage moral de notre football.
Le trio Samuel Eto’o, président de la FECAFOOT, Frank Zambo Anguissa, Clinton NJIÉ posé autour d’une table bien dressée, trinquant, souriant, comme si le Cameroun allait bien. Comme si le vestiaire des Lions Indomptables n’était pas gangrené par la suspicion, les coups bas, les trahisons. Comme si l’on n’avait pas enterré l’idée même de mérite au profit d’un théâtre d’allégeance.
D’abord, il faut dire les choses clairement : ce déjeuner n’est pas un simple repas entre amis. Il est une mise en scène obscène dans un contexte où les Lions Indomptables sont au bord de l’implosion. Tandis que le peuple camerounais attend des réponses, des résultats, une équipe soudée, Samuel Eto’o s’offre une séance de relations publiques aux relents monarchiques. Et comme toujours avec lui, rien n’est laissé au hasard.
En effet, on connaît le goût prononcé du président de la FECAFOOT pour la communication non verbale. À chaque posture, chaque regard, chaque image diffusée, il plante les graines d’un message. On a vu le président de la FÉCAFOOT se filmer devant ses biens immobilier, on l’a vu publier une vidéo abord d’un jet privé, les images d’aujourd’hui sont limpides : “Voici mes hommes.” Ceux qui applaudissent. Ceux qui se taisent. Ceux qui se tiennent debout quand il entre, et qui s’assoient seulement quand il l’ordonne.
Pourtant, pendant ce temps, le vestiaire des Lions gronde. Des soupçons de trahison planent. Des joueurs s’accusent mutuellement d’être les messagersdu président, les yeux et les oreilles de la FECAFOOT dans les couloirs de l’équipe nationale. Et comme par magie, deux de ceux que la rumeur pointe du doigt se retrouvent à la table du roi. Il n’en fallait pas plus pour raviver la douleur d’un peuple qui croyait encore, naïvement, que le football était un espace d’unité.
De surcroît, cette mise en scène ravive les plaies d’un football qui souffre, non pas par manque de talents, mais par excès d’ego. Eto’o, plutôt que d’unifier, divise. Plutôt que de rassurer, il provoque. Plutôt que d’apaiser, il humilie. Où sont les autres joueurs ? Où est cette fameuse union sacrée qu’il prêchait à cor et à cri ? Pourquoi ce tête-à-tête sélectif, sinon pour envoyer un message de défi à ceux qui refusent de s’agenouiller ?
En réalité, ces images sont le miroir d’un pouvoir devenu sourd. Un pouvoir qui se pavane pendant que le pays souffre. Un pouvoir qui sourit pendant que le football se meurt. Un pouvoir qui sert à boire pendant que l’on vide l’esprit d’équipe.
Ainsi, il ne s’agit pas d’un simple cliché. C’est un cliché de trop. Une trahison visuelle. Une déclaration de guerre froide dans un vestiaire déjà fracturé. Et le plus tragique dans tout cela, c’est que certains s’en accommodent. Comme si l’on avait fini par accepter que la FECAFOOT n’est plus une institution au service du football, mais le prolongement d’un ego surdimensionné.
Dès lors, il ne reste plus que la mélancolie. Celle de se souvenir d’une époque où les Lions rugissaient pour le drapeau, et non pour un homme. Celle de se rappeler que le maillot vert-rouge-jaune n’était pas une carte de fidélité, mais un honneur mérité. Celle de voir que dans ce festin de la honte, c’est tout un peuple qu’on a oublié au menu.
Le Cameroun ne mérite pas ça. Pas cette arrogance affichée comme un trophée. Pas cette indécence feutrée où l’on trinque dans l’élégance pendant que le football national s’effondre dans le silence. Pas cette trahison raffinée, maquillée sous des sourires complices et des repas soigneusement orchestrés. Ce peuple qui a tant donné, tant espéré, tant pardonné, mérite mieux que cette mise en scène de cour royale dans un royaume en ruines. Il mérite des dirigeants humbles, des joueurs exemplaires, une institution digne de ce nom. Mais visiblement, ce qu’on lui offre, ce sont des alliances secrètes, des règlements de comptes feutrés, des clans fermés, et des messages codés à travers des photos publiées comme des menaces silencieuses.
Pendant que le roi festoie, les académies meurent. Pendant qu’il s’entoure de ses fidèles, des jeunes talents s’exilent sans repères. Pendant qu’il sourit aux objectifs, les Camerounais pleurent un football qu’on leur a volé, morceau par morceau, jusqu’à l’âme. Et le pire, c’est que cette dérive ne choque plus. Elle s’installe, se normalise, s’impose. Comme si ce pays était condamné à regarder son football sombrer dans les caprices d’un homme trop amoureux de son propre reflet.
Mais viendra le jour où les images ne suffiront plus. Où les applaudissements complices s’éteindront. Où les joueurs comprendront que l’histoire ne retient pas ceux qui trahissent pour un fauteuil, mais ceux qui se tiennent debout pour une nation. Ce jour-là, le festin prendra fin. Et il ne restera que les cendres d’un règne bâti sur la vanité.
Blaise ETONGTEK
Commentaires (1)
Bruno
Vous êtes RIDICULES.